05
NOV 11

La saveur du fragile

Il y a un an, à cet instant du jour, un ange ami me tirait par la manche du côté de la vie.
Et, depuis, les instants d'âme qui s'écoulent dans mon sablier ont de plus en plus souvent la saveur du fragile et du tendre.

 

Reprise d'archive : Un battement de cils - 5 novembre 2010

Saison rousse. Un peintre poète se cache dans le feuillage des châtaigniers, des acacias et des chênes posés là depuis longtemps, le long de l'autoroute. Il y a dans l'air la douceur des lèvres d'une femme juste avant le premier baiser. Et soudain, devant moi, le camion pile et zigzague un instant.

Un battement de cils et c'est la chute. Violente. Le scooter glisse, loin, loin devant moi. Gerbe d'étincelles. Cent vingt kilos de métal, de plastique et d'essence sur la patinoire d'asphalte. La douleur remplace la douceur de l'instant d'avant.
« Non ! Pas la peine d'appeler les secours… Ça va aller, je crois… » Vêtements déchirés, chairs à vif.
Je ne sais comment,
en équilibre sur la machine cassée et hésitante, j'ai repris la route. Et puis comment je suis monté jusqu'à l'atelier en rez de ciel. Faculté intime et de jadis de l'anesthésie dans la violence.

Ici ce matin au jardin le vieux chêne a perdu presque toutes ses feuilles. Les êtres aimés sont là et n'ont presque pas changé. Les images et les sensations du chaos resurgissent une à une. Et, avec elles, comme une plongée dans la peur et les abysses, de l'autre côté de la vie.
Tristesse
profonde et tendresse devant la fragilité de l'être.

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